25 octobre 2020

D comme Dinard

Par jlgrandidier

Mon grand‑père maternel, Louis Offret est né le 4 septembre 1900 à 7 heures du soir à Bégard alors en Côtes‑du‑Nord (aujourd’hui Côtes d’Armor). Son père Jean-François, maçon, est alors âgé de 32 ans et sa mère, Nathalie Marie Goelou alors âgée de 28 ans est ménagère. Il est le cinquième enfant d’une fratrie de douze.

La vie n’était pas facile. Il faut en effet rappeler l’importance de la misère économique, sanitaire et culturelle de la paysannerie française à la fin du XIXe siècle, et particulièrement l’énorme retard de la Bretagne par rapport au reste du pays. Sa mère ne savait ni lire ni écrire.

Il est appelé le 17 mars 1920 pour son service national à Rennes dans la 10ème section COA (commis et ouvriers d’administration). Il sera ramené à la vie civile le 3 mars 1922 et rejoindra sa famille à Bégard.

Dès la fin de son service militaire, l’ensemble de la famille de Jean‑François Offret, avec ses 9 enfants encore vivants certains déjà majeurs, d’autres encore mineurs,(accompagnés d’une « colonie » de Bretons où l’on trouve également les familles Jouan originaire de Plouézec, Jaguin originaire de Bégard et Desnos, qui s’allieront aux Offret) part pour un exil de plus de dix ans à Saint-Masmes (51) pour la reconstruction du pays et de Reims suite à la Première guerre mondiale.

Il y rencontrera sa femme, aura trois enfants ( dont deux décèderont dans leur première année).

La reconstruction terminée, Louis Offret, sa femme (ma grand-mère) et sa fille (ma mère) repartent en Bretagne en 1931, avec quasi tous les Bretons.

La route de « pépère Louis », comme celle de deux de ses frères Yves et Baptiste, s’arrêtera à Dinard (35).

Depuis 1889, Dinard est devenue le rendez-vous de la haute société nationale et internationale. Elle est alors considérée comme la « 1ère Station Balnéaire de France » et accueillait la Société Aristocratique de l’Époque, les grandes familles de la Noblesse et les personnalités des Familles royales européennes, du monde de l’industrie, du négoce, de la politique, des Lettres et des Arts.

Même si les événements extérieurs comme la crise de 1929 vont cependant entamer son déclin de station mondaine : les Britanniques arrêtent peu à peu d’y venir, et d’un coup c’est toute la riche aristocratie qui la déserte. À son climat breton, on lui préfère la Côte d’

Azur, plus à la mode et plus appréciée pour son climat méditerranéen. La ville tombe peu à peu dans l’oubli, seules les villas résistent. La Seconde Guerre mondiale sonne définitivement le glas de Dinard station balnéaire à la renommée internationale.

Mais ce n’est pas seulement pour son patrimoine architectural, ni ses plages, ni ses crêperies,

ni son marché et ses non moins fameuses galettes-saucisses que Dinard à une place à part dans mon cœur.

C’est là que vivait mon grand-père (avec une nouvelle famille, suite à un divorce) chez qui nous avons ‑mon frère jumeau et moi‑, passés quasiment toutes nos vacances de bébés à adolescents…

Dès notre première année, nous avons pu profiter du sable blond du Port-Blanc, mais aussi ‑ plus tard de la pataugeoire sur la digue de la plage de l’Écluse, où nous pouvions sans crainte faire voguer nos petits bateaux. Hélas celle-ci a complètement disparu, laissant place à une « affreuse » structure gonflante !

Plus tard en âge de voyager seuls, nos parents nous conduisaient au train à la gare Montparnasse à Paris et mon grand-père nous attendait à la gare… Sur son vélo qu’il conduisait à la main, il posait notre valise et nous rentrions à pied à La Ville‑es‑Lemetz en suivant le chemin de Feuvrette…

Eh oui, il y avait encore une ligne de chemin de fer directe Paris‑Dinard !  Eh oui, le chemin de Feuvrette sinuait à travers champs et prairies ! Que de changement aujourd’hui !

Je me souviens encore de pépère, de retour de son travail  de maçon, au guidon de sa mobylette, prendre le chemin du potager… Quel plaisir d’arracher avec lui une jeune carotte, de rincer sa terre encore accrochée dans l’eau tirée du puits et de la croquer ! Ou encore de grignoter les petits pois crus directement écossés sur les rames qui les retenaient…

Quelques années, lorsque nous étions plus grands, nous allions cueillir les grosses prunes à La Ville Revaut. Nous étions fiers de ramener la cagette de fruits abimés que nous recevions en contrepartie de nos « efforts » !

Qu’elles étaient belles les vacances à Dinard…

Aujourd’hui, mon grand-père n’est plus, il reste une tante (demi‑sœur de me mère, mais ma marraine) et c’est toujours avec plaisir et nostalgie que je me rends dès que faire se peut à Dinard où chacun de mes pas me rappelle ces vacances heureuses.